Suisse. Le ministre suisse de la défense a bloqué la visite prévue en Israël du chef des forces terrestres suisses Luc Fellay. Cette décision a été prise, selon le journal Le Matin du 27 août, durant la récente guerre du Liban.En revanche, la réunion traditionnelle annuelle entre officiers suisses et israéliens prévue en novembre devrait se tenir.
Morts américains en Irak. On le sait, l’essentiel des victimes qui tombent en Irak sont des Irakiens. Il y en aurait eu plus de 50 000 depuis l’invasion américaine du pays. Une étude détaillée américaine, rapportée par le Washington Post du 26 août, fournit des données très précises sur les morts américains durant ce conflit. Entre le 21 mars 2003 et le 31 mars 2006, on a compté 2321 morts, dont 79% au cours d’actions hostiles. Le taux de mortalité est 5,6 fois moins fort que celui qu’ont connu les troupes américaines au Vietnam, notammet à la suite de l’amélioration de la médecine militaire et de l’utilisation de matériaux de protection pour les soldats. Le rapport entre le pourcentage de morts par rapport à celui des blessés est passé, entre le Vietnam et l’Irak, de 24% à 13% (ce qui veut dire que, proportionnellement, le nombre de blessés en Irak est plus important qu’au Vietnam). D’autre part, les soldats hispaniques ont 20% de chances de plus de mourir que la moyenne, alors que les Noirs ont un taux de mortalité de 40% inférieur à la moyenne (dû à leur forte proportion dans les services non combattants : 7% des Noirs sont dans les Marines, contre 13% pour les non-Noirs). Le nombre de blessés durant la période considérée est de sept fois et demi celui des morts.
Antisémitisme. L’exposition organisée à Téhéran intitulée « concours international de dessins sur l’Holocauste », ne parle pas du tout de l’holocauste ni de la seconde guerre mondiale, selon le New York Times du 25 août. Elle n’attire pas non plus beaucoup de monde. Mais elle contient sûrement des dessins antisémites, où l’on voit des juifs avec un nez énorme, caricatures d’un autre temps, tout cela sous prétexte de dénoncer la politique israélienne. Selon le responsable, cette exposition a un triple but : dénoncer le fait qu’en Occident on puisse caricaturer le Prophète de l’islam mais pas l’holocauste ; se demander pourquoi les Palestiniens doivent payer le prix de l’holocauste ; attirer l’attention sur ce qui serait un nouvel holocauste contre les musulmans. Morris Motamed, député juif au parlement iranien, a déclaré que ces dessins étaient « antisémites et voulant insulter les juifs ». Cette scandaleuse exposition qui, au nom de la défense des Palestiniens et des musulmans, aboutit à nier l’holocauste ou à le minimiser est évidemment pain bénit pour la droite américaine (Nous reviendrons dans un autre article sur les positions de l’Iran à l’égard de l’Etat d’Israël)
Quel est le rôle du lobby juif aux Etats-Unis ?
A la mi-mars 2006, le site de l’université John F. Kennedy de Harvard, mettait en ligne une étude de plus de 80 pages intitulée « The Israel Lobby and U. S. Foreign Policy » (Le lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine), réalisée par deux spécialistes de sciences politiques, John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt. La thèse des auteurs n’est pas nouvelle : au détriment de ses propres intérêts et de ceux de nombreux pays alliés, les Etats-Unis soutiennent la politique israélienne pour des raisons de politique intérieure. Ce qui rend l’étude originale, c’est qu’elle a été rédigée par des universitaires jusque-là peu engagés dans les polémiques sur le Proche-Orient et jouissant d’un grand prestige. D’autre part, leur travail détaille de manière accablante la manière dont le lobby pro-israélien – les auteurs expliquent qu’il ne s’agit en aucun cas d’un « lobby juif », compte tenu du poids qu’y occupent les chrétiens fondamentalistes et du fait que de nombreux juifs américains sont opposés à sa stratégie – travaille concrètement et fait pression, notamment sur le Congrès, pour obtenir des textes et des résolutions parfois hallucinants.
Comme il fallait s’y attendre, on a assisté à quelques tentatives pour dénoncer l’« antisémitisme » de ce texte, voire de leurs auteurs, afin d’empêcher toute discussion, Ainsi, Alan Dershowitz, professeur de loi à Harvard et soutien inconditionnel à Israël, affirma que les deux auteurs avaient puisé leurs arguments sur… les sites néo-nazis. Christopher Hitchens, ancien éditorialiste de gauche rallié à la guerre contre l’Irak, expliquait que cette étude « slightly but unmistakenly smelly » (de manière légère, mais incontestable sentait), l’odeur de l’antisémitisme évidemment.
Le texte a provoqué un début de débat, non seulement aux Etats-Unis, mais même en Israël. Ainsi, Daniel Levy, un ancien conseiller de M. Ehud Barak a pu déclarer que cette étude met en lumière l’impossibilité de toute discussion sérieuse à Washingtonsur la politique israélienne (Haaretz, Tel-Aviv, 25 mars 2006). Aux Etats-Unis, quelques commentateurs se sont félicités de la publication. Michael Massing, dans le New York Review of Books , explique que, « malgré ses nombreux manques, l’étude rend un immense service en forçant un débat public sur un sujet resté trop longtemps tabou ». Tony Judt, dans le New York Times du 8 juin 2006, note : « Les dégâts faits par la peur de l’antisémitisme quand on discute de l’Etat d’Israël est triple. C’est mauvais pour les juifs : l’antisémitisme est suffisamment réel (…) et il ne doit pas être confondu avec la critique politique d’Israël ou de ses appui américains. C’est mauvais pour Israël : en garantissant un appui inconditionnel, les Etats-Unis encouragent ce pays à agir sans tenir compte des conséquences. (…) Mais, plus que tout, cette autocensure est néfaste pour les Etats-Unis eux-mêmes . » Pourtant, à suivre l’appui sans réserve de Washington à l’invasion de Gaza et à l’attaque contre le Liban, on mesure à quel point le chemin sera long pour un débat libre. Plus étonnant peut paraître la critique de Noam Chomsky ou de Joseph Massaad, professeur associé à l’université de Columbia et membre du comité de rédaction de Journal of Palestine Studies. Tout en saluant le courage des auteurs, ils posent une question : en quoi la politique américaine serait-elle différente si le lobby n’existait pas ? Joseph Massad, qui a subi les persécutions du lobby sur son campus universitaire, explique que les Etats-Unis, dans le monde arabe comme ailleurs « sont opposés aux intérêts de la plupart des peuples dans ces régions et ne sont favorables qu’à leurs propres intérêts et à ceux des régimes minoritaires qui servent leurs intérêts, y compris Israël. » Que le lobby existe ou non, selon lui, ne changerait que l’intensité ou le détail de la politique américaine au Proche-Orient, pas sa substance (lire leurs articles dans The Journal of Palestine Studies, printemps 2006, Washington).
Pour un bilan de la discussion, lire l’entretien des deux auteurs avec la revue Mother Jones