Sondage. Un sondage réalisé entre le 14 et le 16 septembre par le Palestinian Center for Policy and Survey Research in the West Bank and the Gaza Strip, publié dans la presse, mais qui n’est pas encore en ligne sur le site donne les résultats suivants. 54% des personnes se déclarent insatisfaites du bilan du gouvernment du Hamas, une insatisfaction qui culmine à 69% sur les questions économiques. Pourtant, en dépit de ce mécontentement, le rapport de force entre les différentes factions a peu évolué en trois mois : les intentions de vote en faveur du Hamas sont passés de 38% à 39%, tandis que celles pour le Fatah sont passées de 39% à 41%. Le point culminant de la popularité du Hamas avait été atteint en mars 2006, avec 47% d’intentions de vote. D’autre part, une majorité des deux tiers (66%) estime que le Hamas ne devrait pas accepter les conditions posées par les bailleurs de fonds pour reprendre leur aide.
Un conseiller de Sarkozy persiste et signe
Les déclarations de Nicolas Sarkozy aux Etats-Unis (lire mon blog continuent de susciter quelques remous. Le quotidien Libération du 18 septembre, publie un article intitulé « Jacques Chirac juge "lamentable" l’atlantisme de Sarkozy ». Dans la même livraison, Pierre Lellouche, conseiller politique de Nicolas Sarkozy persiste et signe. Dans un texte intitulé « L’antiaméricanisme, religion des imbéciles », il écrit : « La dictature du politiquement correct à la française est telle que dire que nous sommes les amis et les alliés des Etats-Unis, que l’on peut pis ! être l’ami d’Israël, serait devenu une sorte de "faute" politique. Celui qui s’en rend coupable serait, en effet, au mieux un inconscient, au pire un supplétif de l’impérialisme américain, mais de toute façon condamné par l’électorat national. Comme Nicolas Sarkozy, je suis convaincu que le refrain de la haine antiaméricaine, ce mauvais nationalisme des imbéciles, n’est que l’apanage d’une certaine élite, au demeurant en perte de vitesse, à gauche comme à droite. » (...)
« Et puis il y a notre intérêt national, en ce début de XXIe siècle particulièrement chaotique et dangereux. Globalisation de la menace terroriste de l’islam radical, qui frappe à New York, Washington, Londres, Madrid et peut, à tout moment, frapper Paris, comme l’a menacé ces derniers jours Ayman al-Zawahiri, le numéro 2 d’Al-Qaeda. Prolifération des armes nucléaires à portée des villes européennes, désintégration d’un certain nombre de pays à la périphérie de l’Europe, multiplication des conflits au Proche-Orient, tous ces sujets exigent plus que jamais l’union des grandes démocraties, que les décisions soient prises en commun, que les stratégies soient communes en matière de renseignement, de lutte antiterroriste, mais aussi de développement et de promotion de la démocratie. »
Et Pierre Lellouche de conclure : « La crise de 2003 a été grave, car émotionnelle, la plus grave sans doute depuis 1966, comme l’a très justement analysé Nicolas Sarkozy. Et, oui, il est temps de tourner la page, de refonder une alliance entre égaux, en confiance, c’est-à-dire sans récriminations inutiles. Il est dans l’intérêt de la France de bâtir une Europe forte dans une alliance équilibrée avec les Etats-Unis. »
Une insulte à la mémoire de Maxime Rodinson
Dans Le Figaro du 19 septembre, Robert Redeker signe une tribune intitulée, « Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre ? ». Ce texte suinte la haine et l’islamophobie, mais ce qui est particulièrement inacceptable c’est la tentative d’enrôler le grand orientaliste français Maxime Rodinson sous sa bannière. Utilisant des bouts de citations tirées de l’article écrit par Rodinson dans l’Encyclopédie Universalis sur Mahomet, Redeker prétend réusmer ainsi la vision développée par Rodinson : « Exaltation de la violence : chef de guerre impitoyable, pillard, massacreur de juifs et polygame, tel se révèle Mahomet à travers le Coran. » Quiconque connaît un peu l’oeuvre de Rodinson, sait à quel point ce résumé ne reflète absolument pas sa pensée. Rodinson, juif et agnostique, a écrit un livre sur le prophète de l’islam, Mahomet (Points, Le Seuil), dans lequel il tente d’expliquer l’action de Mahomet à travers une grille d’analyse matérialiste. Cet ouvrage, souvent censuré dans le monde musulman, n’en présente pas moins une vision respectueuse de l’homme que fut Mahomet, de son action. Rien à voir avec les raccourcis haineux de Robert Redeker...
Illustration et apologie de la dictature tunisienne
Le régime tunisien dispose, depuis de longues années, de nombreux thuriféraires en France. Le premier est sans aucun doute le président de la République Jacques Chirac – ainsi déclarait-il au cours de sa visite officielle en Tunisie, début décembre 2003 que « le premier des droits de l’homme c’est manger, être soigné, recevoir une éducation et avoir un habitat, ajoutant que de ce point de vue, il faut bien reconnaître que la Tunisie est très en avance sur beaucoup de pays » (Lire la réaction de la Ligue des droits de l’homme à ces propos). Jacques Chirac n’a pas le monopole de cette complaisance et des responsables politiques, de gauche comme de droite, n’hésitent pas à chanter les louanges du régime de Zine Abidin Ben Ali.
C’est le cas aussi de certains « intellectuels », comme le prouve un des derniers ouvrages d’Antoine Sfeir, intitulé Tunisie, terre des paradoxes, qui vient de paraître aux éditions de l’Archipel. Le degré de flagornerie à l’égard du chef de l’Etat tunisien y est assez exceptionnel. Ben Ali est ainsi décrit comme réunissant « en sa personne toutes ces compétences. D’une part, elles lui permettent de se montrer plus efficaces, et les résultats obtenus plaident en sa faveur ; d’autre part, la réunion de ces compétences en un seul homme évite de les voir entrer en conflit. » (p. 213)
Le régime est-il policier ? Citant un rapport du département d’Etat, l’auteur affirme que la Tunisie compterait entre 450 et 1000 prisonniers, dont très peu ont été condamnés pour des actes de violence. « On peut le déplorer, certes », précise-t-il. « Mais que penser du Patriot Act ? Faudrait-il accepter que les Etats-Unis se protègent contre l’islamisme et non la Tunisie, où le danger est pourtant bien plus réel et pressant : tentatives de coup d’Etat, assassinats, attentats – dont celui de la synagogue de Djerba – et volonté affichée de renverser le régime pour y instaurer, par la force et la terreur, un Etat dépourvu de toute liberte ? » Etrange raisonnement, puisque l’auteur lui-même affirme que les prisonniers ne sont pas inculpés pour des actes de violence... D’autre part, qui approuve le Patriot Act ? (lire p. 13)
« Autre accusation, poursuit Sfeir : le régime tunisien est un régime policier. Actuellement, il ne l’est pas plus que les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, ou même la France » Il suffit de lire n’importe quel rapport d’Amnesty International, de Human Rights Watch, ou de savoir que, depuis l’arrivée de Ben Ali au pouvoir le nombre de policiers a quadruplé, pour mesurer le sérieux de cette affirmation.
L’auteur célèbre la tenue du sommet mondial sur la société de l’information, dont la seconde partie a eu lieu en novembre 2005. « Le succès de ce Sommet de Tunis, organisé de façon irréprochable, et qui a rassemblé plus de 21 000 participants (...) a été reconnu par tous. » (p. 217). Par tous ? Dans un communiqué distribué à la presse, la délégation américaine s’est déclarée « déçue de voir que le gouvernement tunisien n’a pas tiré profit de cette importante manifestation pour démontrer son engagement en faveur de la liberté d’expression et d’association en Tunisie ». Le président de l’association Reporters sans frontières, Robert Ménard, a été refoulé par les autorités tunisiennes alors qu’il souhaitait assister au sommet. Ceux qui veulent vraiment savoir quelle est la situation de l’information dans un pays où naviguer sur l’Internet peut conduire en prison, peuvent lire un rapport de diverses organisations des droits humains sur la Tunisie et l’information.
En conclusion de son livre, Sfeir aligne une série de déclarations de responsables internationaux saluant le régime de Ben Ali, qui s’ouvre sur le président de l’Union des écrivains russes qui « adhère (...) à la politique d’ouverture et de dialogue initiée » (p. 226) par Ben Ali. « Une question, écrit Sfeir, pourquoi toutes ces déclarations positives pour la Tunisie de Ben Ali ? » Effectivement, on peut s’interroger sur les raisons qui poussent Chirac, le roi Juan Carlos, le ministre allemand de l’intérieur ou le président Bouteflika à faire l’éloge d’un tel régime. Cela demanderait effectivement une étude sérieuse, comme celle de savoir pourquoi certains intellectuels et journalistes se font les défenseurs de Ben Ali...