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Lettre de Chisinau

La Moldavie au bord de l’écartèlement identitaire

par Emmanuel Dreyfus, 28 juillet 2009

Brièvement tirée de l’inexistence médiatique il y a quelques semaines, la petite Moldavie ne semblait jusque-là pas vraiment susciter l’intérêt. Le spectaculaire incendie du Parlement a, si l’on peut dire, fait long feu, et les rassemblements de l’opposition se sont dispersés au bout de quelques jours. La Moldavie, pays le plus pauvre d’Europe, frontalier de l’Union européenne, et théâtre de l’un des quatre conflits gelés de l’espace postsoviétique, est pourtant en train de vivre l’une de ses plus graves crises politiques depuis son indépendance en 1991. En effet, rien ne va plus entre l’opposition et le Parti des communistes de la République de Moldavie (PCRM), au pouvoir depuis huit ans. Un siège lui manquant pour élire le président de la République, de nouvelles élections législatives vont avoir lieu le 29 juillet.

Chisinau, le 5 avril au soir. A l’annonce des résultats donnant une majorité des voix – 50% – au PCRM, quelques groupes de jeunes descendent dans la rue pour exprimer leur mécontentement, alors que les principaux partis d’opposition dénoncent d’emblée des élections falsifiées. Le lendemain, le mouvement s’amplifie et quelques milliers de personnes se rassemblent pacifiquement devant le siège du gouvernement. C’est le 7 avril que la contestation prend un tour plus violent. Le Parlement est pillé et incendié, le siège de la Présidence mis à sac.

La Moldavie, après la Géorgie en 2003, l’Ukraine en 2004, et le lointain Kirghizstan en 2005, prendrait-elle le chemin d’une « révolution de couleur » ? C’est ce que l’on a pu penser pendant quelques jours, ou plutôt quelques heures, durant lesquelles d’importants symboles de l’Etat furent saccagés. De visu, certains éléments des manifestations du 7 avril pouvaient en rappeler d’autres, observés par exemple lors de la « révolution orange » ukrainienne. Il y avait parmi les manifestants un grand nombre de jeunes, arborant pêle-mêle des drapeaux de leurs pays, de l’Union européenne, et, particularité moldave, des drapeaux roumains. Les manifestants scandaient bon nombre de slogans anticommunistes, antirusses et proeuropéens. Sur le siège du Parlement en feu et de la Présidence saccagée furent d’ailleurs hissés des drapeaux de l’Union européenne. Les jeunes avec qui nous avons pu discuter, souvent des étudiants, ne voyaient aucun avenir pour leur pays si celui-ci, pour la troisième fois consécutive, devait être dirigé par le PCRM, dont l’intégration européenne – l’un des grands mots d’ordre des manifestations – était pourtant le principal axe de la campagne électorale.

Il a toutefois manqué à ce mouvement, hâtivement qualifié de révolutionnaire par certains, un certain nombre d’éléments propres aux révolutions de couleur de l’espace postsoviétique.

D’une part, alors que divers organismes internationaux comme l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) avaient dénoncé une fraude importante lors des élections ayant précédé la « révolution des roses » en Géorgie – qui mit fin au pouvoir d’Edouard Chevarnazdé – et la « révolution orange » – qui conclut celui de Léonid Koutchma –, ils n’ont pas signalé d’incidents majeurs concernant les élections moldaves. A de nombreux égards, la Moldavie est considérée par le Conseil de l’Europe comme le pays le plus démocratique de l’espace CEI (Communauté des Etats indépendants). On ne peut affirmer que si le PCRM – loin d’être par ailleurs à l’abri des critiques, notamment en matière d’affairisme, de corruption et de démagogie – a encore remporté les élections, c’est uniquement grâce à ses pratiques autoritaires et à la fraude.

D’autre part, l’opposition en Moldavie n’a pas reçu de soutien extérieur pour préparer un changement de régime, contrairement à ce qui s’était passé en Géorgie, en Ukraine ou en Serbie, où l’on sait que de puissantes organisations, comme la fondation George Soros, aidèrent substantiellement les partis opposés aux régimes en place.

Les pays occidentaux n’ont d’ailleurs pas émis de jugement négatif quant à ces élections, et n’ont pas soutenu les mouvements de protestation qui les ont suivies. La Moldavie n’est pas un pays qui intéresse autant l’Union européenne et l’OTAN que l’Ukraine et la Géorgie. D’autre part, la nouvelle administration américaine, qui cherche l’apaisement des rapports avec la Russie, n’a pas voulu se prononcer sur des élections se déroulant dans un pays de la CEI, dépendant à de multiples égards de Moscou, qui considère ce pays comme faisant partie de son « étranger proche ».

Le fait que l’opposition moldave ait accusé les services secrets russes d’avoir organisé les incidents du 7 avril, et que le Président ait désigné la Roumanie comme le principal responsable de ces débordements, sont des éléments révélateurs du problème identitaire moldave.

Troisième point, et c’est peut-être le plus important, il manquait à ces mouvements de contestation postélectorale une assise populaire. En effet, les manifestations n’ont jamais concerné que quelques milliers de personnes et sont restées circonscrites dans un espace très restreint de la capitale, dont la vie s’écoulait comme un jour normal. Ainsi, dans le grand parc Stefan Cel Mare, pourtant mitoyen du Parlement alors en flammes, les enfants jouaient, les hommes buvaient leurs bières et les babouchkas bavardaient, témoignant la plus grande indifférence à l’égard des manifestants.

Le pays d’Europe à la plus forte population rurale

La Moldavie, ancienne république soviétique, enclavée entre la Roumanie et l’Ukraine, est un pays formé essentiellement par la région de Bessarabie. Annexée par l’Empire russe en 1812, cette région est incluse dans la Grande Roumanie entre les deux guerres, avant d’être remise sur orbite russe en 1944, lorsqu’elle devient l’une des quinze républiques de l’URSS. Désormais indépendante, la République de Moldavie souffre de nombreuses difficultés, à commencer par son extrême pauvreté, tenant à des facteurs tant géographiques – absence de matières premières, pas d’accès à la mer ni à un fleuve majeur, fort enclavement – qu’historiques. Systématiquement perçu comme les confins d’un empire ou d’un pays, le territoire de l’actuelle Moldavie est demeuré dans un état de faible développement affectant particulièrement la population autochtone, qui constitue aujourd’hui 80% de la population et est la moins favorisée socialement.

Quelques éléments illustrent sombrement cette situation : 40% de la population active du pays vit à l’étranger et la Moldavie est, après le Tadjikistan, le deuxième pays au monde à vivre des transferts d’argent de ses travailleurs immigrés. Si la période durant laquelle le pays était connu pour les trafics d’organes qui s’y déroulaient semble heureusement révolue, les trafics d’êtres humains liés au marché de la prostitution y sont d’une actualité toujours préoccupante.

La Moldavie, où le salaire moyen est de 150 euros par mois, est le seul pays d’Europe où plus de la moitié de la population vit à la campagne. Sa ressource principale, l’agriculture, secteur à faible valeur ajoutée, est toujours sous la menace des aléas politiques, en l’occurrence les embargos imposés par la Russie, premier marché d’exportation agricole moldave. On pense notamment à l’embargo sur le vin, décrété en 2006 à la suite d’un différend avec Chisinau, et qui eut des conséquences désastreuses pour l’économie du pays.

Ajoutons que la partie la plus riche et la plus industrialisée de la Moldavie, la Transnistrie, a fait sécession en 1992, ce qui grève l’économie moldave et freine les investissements. Pays le plus pauvre d’Europe, la Moldavie souffre par ailleurs d’un lourd problème identitaire.

Peuplée à 80% de roumanophones, l’actuelle Moldavie était une région de la Principauté de Moldavie, dont la plus grande partie et la capitale historique, Iasi, se trouvent actuellement en Roumanie. Les drapeaux moldave et roumain se ressemblent, le moldave n’est autre que du roumain avec quelques variantes provinciales, et une grande partie du panthéon littéraire et culturel moldave est constituée de personnalités roumaines. Cette proximité linguistique, culturelle et historique est telle qu’un courant unificateur assez important a vu le jour à la fin des années 1980, lors de la chute des régimes socialistes. Aujourd’hui, bon nombre de citoyens moldaves détiennent, du fait de leurs origines familiales, un passeport roumain qui leur permet notamment de voyager librement au sein de l’UE.

Le fait que la Moldavie et la Roumanie n’aient pas signé de traité de frontières, et certaines déclarations récentes du président roumain Traian Basescu, affirmant que « la Moldavie est une mer de citoyens roumains », ou encore que « la Moldavie est la RDA roumaine », sont des éléments révélateurs des problèmes liés à la question de l’identité moldave. Ce genre de propos est très mal vu des autorités moldaves, qui y lisent une volonté à peine dissimulée d’annexion de leur pays. Un régime de visa concernant les citoyens roumains voulant se rendre en Moldavie a d’ailleurs été mis en place après les évènements du 7 avril.

Ce problème identitaire a clairement été mis en évidence lors des manifestations d’avril. C’est en effet aux couleurs de la Roumanie que la majorité des manifestations se sont déroulées ; c’est en scandant des slogans proroumains que les manifestants battirent le pavé, contestant la victoire d’un PCRM prorusse, antiroumain, falsificateur de l’histoire et par ailleurs corrompu et autoritaire.

Vains efforts de « moldavisation »

Il est vrai que certaines actions du PCRM vouées à la construction d’une identité moldave spécifique peuvent prêter à rire, ou, c’est selon, à pleurer. On songe à la publication d’un dictionnaire bilingue roumain-moldave en 2003, et plus généralement à la constante volonté des communistes de substituer, dans une pure tradition soviétique, le terme moldave à celui de roumain, particulièrement dans le domaine de la littérature, de l’enseignement et de la culture. Si la grande majorité des Moldaves est indifférente à cette politique hasardeuse, une minorité active, celle qui est descendue dans la rue début avril, et formée de personnes qui se sentent roumaines (2,2% lors du recensement de 2006), s’y oppose.

Par ailleurs, la politique du président moldave Vladimir Voronine peut paraître davantage soucieuse des Russes et de la Russie en Moldavie que de la Moldavie et des Moldaves eux-mêmes. Le gouvernement moldave a ainsi tenté de rendre obligatoire dès l’école primaire l’enseignement de la langue russe, qui bénéficie déjà du statut de langue de communications interethnique dans la Constitution. M. Voronine, qui, selon certains, serait détenteur d’un passeport russe, s’exprime lui-même plus aisément en russe qu’en « moldave », et, malgré son engagement proeuropéen, demeure très attaché aux relations avec la Russie et les autres pays de la CEI.

Cette volonté de moldavisation, les constantes tensions diplomatiques avec la Roumanie, et le tropisme russe structurel du gouvernement moldave, que l’on a pu observer ces huit dernières années – et qui n’a cependant pas empêché un revirement pro-européen en 2005 – ont été abondamment dénoncés par les manifestants et les principaux partis d’opposition. Cette politique paraît néanmoins procéder d’un certain pragmatisme dont la Moldavie ne peut pas forcément faire l’économie.

La population de la Moldavie n’est pas ethniquement homogène et compte 20% de minorités, essentiellement des Ukrainiens, des Russes et des Gagaouzes, qui parlent généralement russe parce qu’ils ne maîtrisent pas et ne veulent pas maîtriser le « moldave ». Leur rôle en Moldavie est loin d’être négligeable.

Les Gagaouzes, des chrétiens théoriquement turcophones mais s’exprimant le plus souvent en russe et représentant 3 à 4% de la population moldave, sont regroupés dans le sud du pays, au sein d’une entité autonome gagaouze reconnue par la Constitution. Animés, au début des années 1990, par un fort mouvement sécessionniste, principalement alimenté par la peur d’une union de la Moldavie à la Roumanie, les Gagaouzes, qui ont reconnu l’indépendance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, se contentent aujourd’hui de leur autonomie administrative mais pourraient de nouveau faire montre de leur sentiment indépendantiste si une force politique trop proche de la Roumanie et peu soucieuse du sort des minorités arrivait au pouvoir. On pense à ce sujet aux propos de Mihai Ghimpu, président du Parti libéral qui obtint 12,91% des voix aux dernières législatives : il déclarait que les Gagaouzes étaient « un ulcère sur le corps du peuple moldave ». Ce genre de propos insultants ne peuvent que nuire à l’unité déjà précaire de la Moldavie.

Les Russes et les Ukrainiens, qui constituent 15% de la population moldave, représentent une minorité plutôt privilégiée socialement, comme du temps de la Russie tsariste ou de l’URSS. Ils vivent essentiellement dans la capitale, Chisinau, ville dans laquelle il est plus utile de parler russe que « moldave ».

Penchants prorusses contre penchants proroumains

La politique plus que conciliante de M. Voronine à l’égard de la Russie et des Russes de Moldavie doit également être analysée à la lumière du problème de la Transnistrie. Contrairement à l’Abkhazie, à l’Ossétie du Sud et au Nagorno-Karabagh, il n’y a pas de motifs ethniques au séparatisme transnistrien, dans la mesure où la population de cette République autoproclamée est composée à part égale de Russes, d’Ukrainiens et de Moldaves. Cela dit, les 500 000 habitants de cette mince bande de terre se sentent aujourd’hui bien plus proches de la Russie que de la Moldavie, de la Roumanie ou de l’Union Européenne. La Transnistrie a récemment émis le souhait d’adopter le rouble russe comme monnaie officielle, aux cotés de la rouble transnistrienne, et le drapeau russe comme emblème, aux cotés du drapeau transnistrien – rouge et vert, et flanqué d’une faucille et d’un marteau. Lors du référendum de septembre 2006, 97,1 % des habitants de ce territoire se sont déclarés en faveur d’un rattachement de leur « pays » à la Fédération de Russie.

En Transnistrie, outre un décorum soviétique qu’on constate dès que l’on se trouve à la « frontière » avec la Moldavie, tout est écrit en russe, et les posters en l’honneur de Vladimir Poutine ou de Dimitri Medvedev sont légions, de même que les statues de Lénine, demeurées intactes.

De toute évidence, la Russie, qui a dans cette zone quelque 1 500 soldats chargés du maintien de la paix, ne souhaite pour le moment ni annexer la Transnistrie, avec laquelle elle ne partage pas de frontières, ni la voir devenir indépendante de la Moldavie. Elle observe pour le moment un statu quo à l’égard de cette province, grâce à laquelle elle peut faire pression sur la Moldavie – et indirectement sur l’Ukraine – et avoir une présence militaire hors de ses frontières et à proximité de la Mer Noire.

On peut comprendre que les tentatives moldaves visant à réintégrer de facto la Transnistrie passent par une politique de conciliation vis-à-vis de la Russie et des intérêts russes en Moldavie au sens large, comme la défense de la langue russe. Les Transnistriens n’accepteront jamais de réintégrer un pays dans lequel la langue russe n’est pas protégée, et qui montrerait plus de sympathie à l’égard de Bucarest que de Moscou. La Roumanie jouit d’une très mauvaise image en Transnistrie, où elle est encore associée à l’Allemagne nazie. Il est vrai que les armées roumaines du maréchal Antonescu n’ont pas brillé par leur humanisme au cours de la seconde guerre mondiale, dans cette région où furent tués dans des conditions effroyables, entre 1941 et 1944, 180 000 juifs. L’événement est encore très présent dans l’esprit de la population transnistrienne, du fait, aussi, d’une propagande antiroumaine constamment entretenue par les autorités.

A cet égard, les événements du 7 avril, même s’ils concernaient une minorité de Moldaves, ont été plus que négatifs pour les relations moldo-transnistriennes. Les négociations entre les deux parties, rouvertes depuis peu, ont en effet été rompues par Tiraspol, qui ne voit pas l’intérêt de négocier avec un pays dont les habitants réclament le rattachement à la Roumanie. Il est probable que les rapports entre la Moldavie et cette province sécessionniste s’enveniment en cas de victoire de l’opposition.

Une opposition pas si « démocratique » que ça

En effet, de la même façon qu’en Ukraine, et d’une certaine manière en Géorgie, les partis politiques souhaitant détacher leurs pays de la sphère d’influence russe et l’intégrer aux structures euro-atlantiques, trop hâtivement présentés comme démocratiques en Occident, peuvent prendre des visages inquiétants, et notamment celui d’un nationalisme parfois malsain. On pense ainsi au sort réservé aux minorités dans la Géorgie de Mikheïl Saakachvili. On peut aussi évoquer l’actuelle réhabilitation en Ukraine – depuis que les leaders de la « révolution orange » sont au pouvoir – des combattants nationalistes ukrainiens, alliés des nazis durant la seconde guerre mondiale, et complices de la dramatique extermination des juifs d’Ukraine.

En Moldavie, les partis d’opposition qui, comme le PCRM, souhaitent l’intégration de leurs pays à l’Union européenne, mais, contrairement à ce dernier, également à l’OTAN, peuvent parfois laisser dubitatifs. D’une part, quel est l’intérêt politique de promouvoir l’intégration au traité de l’Atlantique Nord dans un pays où plus de 70% de la population y est opposé ? D’autre part, peut-on sérieusement envisager que la Transnistrie, proche de la Russie et fortement antiroumaine, accepte de réintégrer une Moldavie regardant vers l’OTAN et dirigée par des forces politiques qui refusent souvent de s’exprimer en russe, arborent des drapeaux roumains dans leurs meetings et sur leurs sites Internet, et parfois – c’est le cas de certains députés de l’opposition –, déclarent publiquement que le maréchal Antonescu est leur référence historique et politique ?

Pour résoudre pacifiquement le séparatisme transnistrien, consacré en 1992 à la suite d’un bref mais sanglant conflit, les pouvoirs en place à Chisinau doivent accepter le caractère prorusse de cette province.

On peut se demander comment évoluerait le pays s’il était dirigé par des forces politiques manquant de pragmatisme et faisant montre d’un certain nationalisme – terme qui, en Moldavie, désigne un attachement fort envers la Roumanie. Les exemples ukrainiens et géorgiens sont éloquents à cet égard. L’Ukraine est en crise politique quasi-permanente depuis la « révolution orange », alors qu’en Géorgie, M. Saakachvili, qui a voulu régler par la force le séparatisme de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, a fait perdre à son pays l’espoir de réintégrer à court terme ces deux provinces. Sa crédibilité, tant en Occident qu’au sein de la population, en a été sérieusement entamée.

Il faut bien admettre que les nouveaux Etats indépendants issus de la décomposition de l’URSS ont une histoire commune avec la Russie, parfois depuis des siècles, et gardent avec ce pays des liens nombreux et multiformes, qui ne peuvent être défaits en quelques années. Il apparaît qu’en Moldavie, le PCRM, qui par ailleurs, après deux mandats consécutifs, n’a pas pu résoudre les principales difficultés du pays, soit l’un des seuls partis politiques majeurs qui aient conscience de la nécessité de maintenir de bonnes relations avec Moscou, tout en promouvant une Moldavie européenne.

Quel que soit le résultat des élections, qui devraient selon toute vraisemblance donner le PCRM gagnant, on peut malheureusement craindre que la situation critique de la Moldavie n’évolue guère. L’intégration européenne, réclamée par les principales forces politiques, n’est pas d’actualité, la Moldavie étant en effet concernée par le programme de Partenariat oriental lancé récemment par Bruxelles à destination de six anciennes républiques soviétiques, ce qui constitue davantage une aide visant normaliser les relations entre l’UE et ses voisins qu’un prélude à leurs adhésions. Le problème transnistrien ne devrait pas non plus connaître à court terme d’évolution positive.

Enfin, l’avenir de la petite Moldavie est fortement conditionné par celui de l’Ukraine, pays dans lequel doivent se tenir d’importantes élections présidentielles au mois de janvier prochain. L’issue de ces élections pèsera sur le sort de la Transnistrie, qui a une « frontière » commune avec l’Ukraine, et donc, a fortiori, sur celui de la Moldavie.

Les perspectives pour les années à venir ne sont guère lumineuses, et on peut même se demander si cet Etat, crée artificiellement, sans identité solide, et sous la menace de sécessionnismes plus ou moins latents, parviendra à pérenniser son existence.

Emmanuel Dreyfus

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