C’est un accord historique : 300 millions d’euros pour la protection des frontières méridionales de la Libye. L’appel d’offre a été remporté par l’entreprise Selex Systems Integrations, associée à la firme Finmeccanica commissionnée par l’Etat italien. Il est question d’installer un ensemble de stations radar pour quadriller et surveiller l’immense étendue désertique entre la Libye et ses voisins (le Soudan, le Tchad et le Niger). L’accord, signé en octobre 2009, devrait être opérationnel au cours des trois années qui viennent. Les « fonds pour le renforcement de la frontière sud de la Libye » seront attribués… par le gouvernement italien et l’Union européenne (1).
Exemple éclatant d’externalisation de la surveillance des frontières, cette opération figure noir sur blanc dans le Traité d’amitié de partenariat et de coopération signé à Bengazi, le 30 août 2008, entre le « guide » libyen Mouammar Kadhafi et le président du Conseil italien, Silvio Berlusconi. Un accord qui aide à refermer la page du contentieux colonial, mais qui en même temps trace les contours d’une nouvelle stratégie de lutte contre l’immigration dite irrégulière.
L’Italie prend en charge le renforcement de la frontière sud de la Libye et les travaux sont confiés à une entreprise italienne. En échange, la Libye accepte les « refoulements directs » sur son territoire. Depuis le mois de mai 2009, les embarcations interceptées dans le canal de Sicile sont renvoyées en Libye sans que les passagers aient pu fouler le sol de l’Union européenne.
Peu importe qu’à bord puissent se trouver de potentiels demandeurs d’asile et que Tripoli n’ait jamais signé la Convention de Genève. M. Berlusconi l’a lui-même expliqué clairement au moment de la signature du Traité : « Nous aurons ainsi plus de pétrole et moins de clandestins. »
A lire en complément
• « Comment l’Union européenne enferme ses voisins », par Alain Morice et Claire Rodier, Le Monde diplomatique, juin 2010.
• « Les camps d’étrangers, symbole d’une politique », par Olivier Clochard, Visions cartographiques, 1er juin 2010.
• « L’Egypte veille sur les frontières d’Israël », par Alain Morice, Visions cartographiques, 4 juin 2010.