En principe, une instance ou « conférence » interparlementaire doit être mise en place pour assurer à l’avenir le suivi de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), y compris la politique européenne de sécurité et de défense (PESD), aujourd’hui renommée « politique de sécurité et de défense commune » (PSDC)… Cela fait beaucoup d’acronymes au mètre carré, pour une politique quasi inexistante, ou en tout cas défaillante, incapable d’exister vraiment face aux Américains, aux grandes puissances d’Asie, et aux nations montantes d’Amérique latine, d’Afrique et du Proche-Orient.
Fin mars, dans un dernier rapport, le président et rapporteur de la Commission pour les relations parlementaires et publiques de l’Assemblée, Armand de Decker (Belgique, Groupe libéral), relevait que « face à la crise libyenne et à la révolution stratégique autour de la Méditerranée, les multiples réponses données aux événements en cours ont témoigné d’une incapacité des Européens à agir ensemble de manière unie et efficace. Un “outil” est particulièrement nécessaire pour sauver la politique européenne de sécurité et de défense et contribuer à remédier à cette situation dommageable pour l’Europe ».
Perte de contrôle
A propos de l’éventuelle – mais assez improbable - création de cet « outil », le dernier président en titre de l’assemblée, le britannique Robert Walter (Groupe fédéré) a mis en garde lundi ses collègues contre « l’absence d’action dans ce domaine [qui] à n’en pas douter, se traduira, pour les parlementaires nationaux, par une perte de contrôle démocratique, dont les conséquences risqueraient d’être désastreuses pour la poursuite de l’élaboration d’une politique européenne commune, indispensable dans le domaine des affaires étrangères, de la sécurité et de la défense ».
Ce sont justement les Britanniques – en l’occurrence l’ancien gouvernement travailliste – qui ont eu la peau de cette institution, obtenant de haute lutte qu’elle cesse ses activités au plus tard à la fin du mois de juin 2011 – ce qui a été réalisé avec quelques semaines d’avance.
Voeux de la baroness
Catherine Ashton, l’actuelle « haute représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et vice-présidente de la Commission européenne », avait délégué son secrétaire général, Pierre Vimont, pour prononcer les éloges de circonstance : « Hauteur de vue … clairvoyance … rôle précurseur crucial » de ces parlementaires, dont la « vision européenne » avait débouché sur la Plate-forme sur les intérêts européens en matière de sécurité (La Haye, 1987), la définition des « missions de Petersberg » (1992) (1) incorporées dans le Traité d’Amsterdam (1997), ainsi que sur les premières opérations menées sous l’égide de l’UEO : déminage dans le Golfe Persique au cours de la guerre Iran-Irak (1987-1988), ex-Yougoslavie (1992-1996), Albanie (1997). Ou plus récemment, la création d’un Centre européen d’Image satellitaire.
« Les efforts de l’UEO n’auront pas été vains. Ils ne sont pas perdus ! », assure la Haute représentante. Mais, outre que la « baroness » (2) Catherine Ashton est elle aussi travailliste et britannique, ses encouragements sont de peu de poids au moment où son propre rôle à la tête de la diplomatie européenne – et sa méconnaissance en particulier de tout de qui a trait à la défense et à la sécurité – font l’objet de critiques de plus en plus acerbes à Bruxelles et ailleurs, y compris dans des milieux jusqu’ici plutôt arrangeants, comme chez les parlementaires et ministres belges.
Parlements nationaux
Trois « rapports testaments » ont été présentés et adoptés, au cours de cette ultime session :
• « La politique étrangère, de sécurité et de défense de l’Europe : bilan et perspectives », Commission politique, par Mike Hancock (Royaume -Uni, Groupe libéral) ;
• « La politique de sécurité et de défense commune : jalons pour l’avenir », Commission de défense, par Françoise Hostalier (France, Groupe PPE/DC) et Jean-Pierre Kucheida (France, Groupe socialiste) ;
• « L’avenir des capacités européennes de défense », Commission technique et aérospatiale, par José Mendes Bota (Portugal, Groupe PPE/DDC).
L’allemand Klaus Bühler, un des anciens présidents de l’assemblée, a souligné que l’Europe était un géant sur le plan économique, mais un nain sur le plan politique. L’Assemblée de l’UEO aura été, selon lui, un organe « politiquement fort » pour promouvoir une politique de sécurité et de défense de plus en plus solidaire.
Le belge Charles Goerens a mis l’accent sur l’importance de la « double mission de contrôle et d’impulsion politique » de l’Assemblée de l’UEO : si le Parlement européen a bien son « mot à dire » en matière de PESC/PSDC, les budgets de défense restent du ressort des parlements nationaux.
Enfin, pour Nigel Evans, vice-président de la Chambre des Communes, l’avenir du contrôle interparlementaire de la PESC/PSDC, « qui restera pour longtemps encore une politique intergouvernementale », ne peut se concevoir « en dehors des parlements nationaux » qui votent les budgets de défense et autorisent l’envoi de troupes à l’étranger.