Les journalistes ne se prêtent au jeu de l’interview qu’avec une grande méfiance. Ce sont pourtant les mêmes qui pratiquent l’exercice quotidiennement avec ou sur d’autres. Cela pourrait être le principal paradoxe de la presse : une société opaque censée faire la transparence sur le monde. Ainsi tout au long du film de Julien Brygo, Pierre Carles et Aurore Van Opstal voit-on des journalistes et éditorialistes aux visages plus ou moins inquiets, parfois renfrognés, sinon agacés, répondre aux questions. Ceux qui ont accepté de recevoir l’équipe sont confrontés à un regard critique sur leur métier, pièces à convictions à l’appui – coupures de presse et extraits d’émissions télévisées ou radiophoniques. Une saine mesure contre l’amnésie qui est l’ordinaire du monde médiatique comme le dit l’un des analystes dont les commentaires s’insèrent entre les interviews et les images d’archives.
En voyant le résultat, les journalistes interrogés auront sans doute le sentiment d’avoir été piégés. Ils n’auraient pas accepté s’ils avaient su… Cela eut été dommage car ils font beaucoup rire. Et surtout penser. Sans doute est-il juste de dire, comme le soutiennent Laurent Joffrin, Jean-Michel Apathie et d’autres, que les éditorialistes ne font pas l’opinion mais ils délimitent un espace du politiquement pensable. Chacun n’est pas important mais leur ensemble l’est. Et ne leur en déplaise, car ils ne sont pas toujours francs, naïvement ou cyniquement, ils cèdent bien à la tentation de faiseurs de rois.
Informations et visionnage sur le site de Pierre Carles.
Un premier montage du film a pu être diffusé avant le premier tour de l’élection présidentielle. Un second devrait être mis en ligne entre les deux tours. Les auteurs entendent sortir une version intégrale à l’automne 2012, et réussir à le faire circuler en salles d’ici la fin de l’année. Ils sollicitent pour cela le soutien du public.