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Deux Chinois à Paris

par Martine Bulard, 10 décembre 2015
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Zhang Xioagang. – Bloodline : Big Family (1993)
Huile sur toile, collection de l’artiste

«Dans le monde d’aujourd’hui, toute culture, toute littérature et tout art appartiennent à une classe déterminée et relèvent d’une ligne politique définie. Il n’existe pas, dans la réalité, d’art pour l’art, d’art au-dessus des classes, ni d’art qui se développe en dehors de la politique ou indépendamment d’elle. » Ainsi parlait Mao Zedong quand il définissait les missions des artistes. Avec l’ouverture de la Chine, la peinture s’est libérée de cette vision utilitariste où le « service du peuple » se confondait allégrement avec l’étroitesse des dirigeants… Même si actuellement une sorte de « néo-réalisme socialiste » refait surface par ces effets de mode dont la pensée de marché est friande.

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Liu She. – Light Rain (1991)
Encre et couleur sur soie

A partir des années 1980, et plus encore au début du deuxième millénaire, les artistes chinois se sont confrontés à l’Occident. Parfois ils ont sombré dans les filets des marchands d’art pour produire ce que les Occidentaux sont censés attendre d’artistes exotiques. Le plus souvent, ils ont inventé un style propre, très critique de leur histoire et de leur société (voir par exemple le tableau ci-dessus). Phaidon a publié un formidable recueil de L’Art chinois qui porte « un regard contemporain de 6 000 ans d’histoire » à offrir à tous les amoureux de la Chine (1).

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Zhang Yidan. – The Reclusive Soul (2013)
Couleur sur papier

Parallèlement l’art traditionnel des paysages (lavis, encre, aquarelles… ), toujours enseigné à l’Académie nationale de peinture de Pékin, connaît un nouvel essor. Sans doute marqué par la volonté d’artistes de redonner vie aux racines millénaires de la culture chinoise qui semblent disparaître sous une modernité uniformisante. Fidèles aux codes anciens, les peintres contemporains innovent et portent un regard acéré sur la société dans laquelle ils vivent.

Pour comprendre cette cohabitation entre l’art ancien et l’expressivité moderne, il faut aller voir l’exposition de deux maîtres du genre, Zhang Yidan et Liu She au Centre culturel de Chine à Paris (2). Les peintures de Zhang Yidan, à l’encre et en couleurs bleues et vertes, renouvellent le genre, avec une capacité formidable à souligner tout à la fois le romantisme des paysages et la pesanteur de la nature. On y découvre également de très beaux portraits de femmes.

Liu She peint lui aussi des paysages selon la tradition mais foisonnant de couleur franches (vert, jaune et parfois rouge). On retiendra surtout ses paysages à l’encre de Chine sur papier, empreints de finesse et de profondeur, parfois nimbés d’une blancheur poétique, parfois fuyants vers l’horizon, parfois d’une précision minutieuse… A voir pour comprendre un courant artistique singulier qui veut retrouver ses racines sans s’y enfermer.

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Yang Shaobin. – 800 Meters Under, no 8 (2006)
Huile sur toile, Espace Long March, Pékin
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Liu She. – Street Lamp (2015)
Encre sur papier

L’âme de l’encre & l’assonance des couleurs Exposition de peinture de Liu She et Zhang Yidan,
du 26 novembre au 11 décembre 2015 ;
au Centre culturel de Chine (bâtiment classique),
1, boulevard de la Tour-Maubourg, Paris VIIe.

Martine Bulard

(1Lire Colin Mackenzie, Keith Pratt, Jeffrey Moser, Katie Hill, L’Art chinois, Phaidon, Paris, 2014. Recension de l’ouvrage dans Le Monde diplomatique d’avril 2015.

(2Centre culturel de Chine, 1 rue de La Tour-Maubourg, 75007 Paris, entrée gratuite.

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