Percée du Qatar avant la France
Selon nos sources, les résultats du premier tour ont créé la surprise, avec une nette avance du candidat du Qatar (19 voix). L’ancien ministre de la culture Hamad Bin Abdelaziz Al-Kawari se distingue, en partie grâce à des fidélités africaines acquises récemment. Un « confidentiel » de l’hebdomadaire Jeune Afrique signale ainsi que les 58 membres du Conseil exécutif de l’Unesco ont été invités au Qatar dans le cadre de la campagne en vue du poste, mais que 10 seulement ont fait le voyage à Doha. En revanche, sur les 12 membres du Conseil exécutif ayant répondu à l’invitation du candidat qatari le 30 septembre à La Terrasse, un restaurant proche du siège de l’Unesco, à Paris, sept représentants de pays africains (Afrique du Sud, Algérie, Cameroun, Kenya, Maurice, Togo et Sénégal) ont répondu présent.
Lire aussi Anne-Cécile Robert, « L’Unesco en danger », Le Monde diplomatique, septembre 2013.
Seconde en lice, l’ancienne ministre française de la culture Audrey Azoulay aurait récolté 13 voix, avant les candidats du Liban (6 voix) et de la Chine (5 voix). Et ce, malgré les critiques sévères que lui a adressé le 20 avril par courrier Jack Lang, actuel président de l’Institut du monde arabe (IMA), qui lui reproche de récupérer pour sa campagne au poste de l’Unesco une initiative franco-émiratie pour la défense du patrimoine qu’elle n’a pas soutenue auparavant. Dans ce courrier, dont Le Monde Diplomatique a obtenu copie, il lui reproche de ne pas avoir eu « la présence d’esprit de l’appeler ou de le convier » pour faire un déplacement à New York et défendre le projet aux Nations unies, alors qu’il avait « initié le projet de résolution au Conseil de sécurité ».
La candidate égyptienne, favorite des Africains ?
Lire aussi Geneviève Clastres, « Unesco, un label qui se mérite », Le Monde diplomatique, mars 2015.
Quant à Moushira Khattab, la candidate égyptienne, née en 1944, ancienne diplomate et ex-ministre de la famille et de la population, soutenue par l’Union africaine (UA) et la presse africaine, elle aurait glané 11 voix. Elle reste en lice parmi les favoris, en tant que femme candidate ayant un profil jugé plus « sérieux », à un poste qui n’a jamais été occupé par un ressortissant du monde arabe. C’est pourquoi le candidat de l’Irak au poste, Saleh al-Hasnawi, s’est désisté en faveur de l’Égypte, alors que le Qatar et le Liban ont maintenu leurs propres candidats.
Le suspense reste entier sur le sort de cette militante des droits de l’homme, qui se positionne aussi comme la candidate de l’Afrique. Il dépendra en grande partie des reports de voix, désistements et du choix des membres africains du Conseil exécutif, qui pourraient se désolidariser du Qatar en fin de parcours, pour faire valoir une voix issue du continent.
Depuis le départ d’Amadou Makhtar Mbow, directeur sénégalais de l’Unesco de 1974 à 1987, un Espagnol (Federico Mayor), un Japonais (Koishiro Matsuraa) et une Bulgare (Irina Bokova) se sont succédés à la tête de l’importante agence onusienne, dotée d’un budget de plus de 650 millions de dollars.