Le 19 mars 2021, Le Monde a publié un entretien réalisé par « vidéoconférence » avec l’ancien président du Brésil (2002-2010) : « Luiz Inàcio Lula da Silva : “Je ne verrai aucun problème à être candidat” ».
Lire aussi Frédéric Pierru, Frédérick Stambach & Julien Vernaudon, « Les brevets, obstacle aux vaccins pour tous », Le Monde diplomatique, mars 2021.
Alors que, d’une part, le Tribunal de Curitiba a été estimé incompétent pour traiter les poursuites à son encontre et que le juge responsable des accusations dont il fait l’objet, M. Sérgio Moro, a été déclaré partial par la Cour suprême du pays, M. Lula da Silva est désormais libre de se présenter à la présidentielle de 2022.
Au cours de l’entretien, les journalistes Nicolas Bourcier et Bruno Meyerfeld ont interrogé le favori des sondages pour prendre la tête de la première puissance latino-américaine dans moins de deux ans, sur le moyen de vaincre la pandémie de Covid-19. L’équipe de communication de M. Lula da Silva a rendu publique l’intégralité de l’entretien, au cours duquel ce dernier lance un appel virulent au président français Emmanuel Macron, afin que la France prenne ses responsabilités.
Grâce à Christophe Ventura, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) et au Réseau européen pour la démocratie au Brésil (Red-Br), nous présentons ici la partie de l’entretien consacrée à la lutte contre le Covid-19.
« Regardez ce qui s’est passé en 2008. Quand il y a eu la faillite de Lehman Brothers, le monde entier s’est réuni. Nous avons créé le G20 pour sauver le système financier. Maintenant, nous avons une pandémie, et il n’y a eu aucune réunion du G20. Il n’y a eu aucune réunion du G8 pour discuter de la pandémie. D’ailleurs, j’aimerais profiter des pages du journal Le Monde pour le dire au président Macron.Hier j’ai dit lors d’une interview pour CNN qu’il était nécessaire que président [américain Joseph] Biden convoque le G20 et qu’il fallait que l’ONU convoque une assemblée extraordinaire virtuelle, que le G8 se réunisse, qu’il était nécessaire d’appeler le G20, la Chine, l’Inde, Poutine en Russie et les principaux dirigeants de cette planète terre.
Assumer la responsabilité que nous sommes en guerre, pas une guerre entre pays, mais contre un ennemi puissant. Et que nous tous, nous devons faire en sorte que ce vaccin ne soit pas une marchandise commerciale mais qu’il soit transformé en un bien de l’humanité. Et que les pays riches assument la responsabilité et fassent que le vaccin parvienne à tous les pauvres de la planète, et avant tout aux pays les plus pauvres.
C’est ce que j’attends des dirigeants européens, c’est ce que j’attends des dirigeants américains, je ne vais même pas parler du président brésilien parce que celui-là il ne comprend rien à rien.
Mais c’est ce que j’attends de l’ONU, de Poutine, de l’Inde. Parce qu’il faut que les dirigeants se comportent comme d’authentiques leaders politiques. Ce n’est pas une commission européenne qui va s’occuper de ça. Ce sont les présidents élus démocratiquement par les urnes qui doivent assumer leur responsabilité.
C’est pour cela que je voudrais lancer un appel à Macron pour qu’il contacte ses homologues européens, qu’il appelle Biden, [le président chinois Xi] Jinping, [le président russe Vladimir] Poutine et qu’il propose une réunion des pays les plus riches du monde afin de discuter de la meilleure manière de produire des vaccins pour que toute l’humanité puisse vivre. »