Mercredi 29 juin 2022, 19 heures. Une quarantaine de personnes se pressent aux Phares, un local associatif municipal de l’Ile-Saint-Denis (93), à l’appel de la jeune association « Protection des Berges de Seine » : collectifs, associations, kayakistes, pénichards, citoyens, élus…, dont Michel Bourgain, figure historique des Verts, et ancien maire de l’Ile-Saint-Denis. Objectif : un point d’information, le calendrier des actions à venir, et l’organisation pour y faire face.
L’affaire leur est tombée dessus par hasard il y a un peu plus de six mois, comme le raconte Antoine Gaudin, le jeune président de l’association, enseignant-chercheur qui y consacre depuis tout son temps libre. « Je cherchais des renseignements pour une autre affaire au Port de Genevilliers, et je tombe sur ce projet qui n’avait fait l’objet d’aucune publicité. »
Un projet ahurissant. Le 20 juin 2021, Haropa Ports et le port de Gennevilliers avaient officialisé le lancement de la construction d’un entrepôt géant nommé « Green Dock », dans l’enceinte du port. Une « plateforme multimodale » d’un coût évalué à 150 millions d’euros, qui doit voir le jour d’ici à 2025, et dont le maître d’ouvrage, lauréat de l’appel à projet, est la multinationale australienne Goodman, spécialiste de la logistique. Il permettra d’accueillir jusqu’à seize entreprises de logistique. Trois d’entre elles se sont déjà positionnées et ont participé à la conception du projet : Stef, DB Schenker et Ceva logistics. Édifié sur un foncier de 6,5 hectares, en bord de Seine, le futur bâtiment représentera 90 000 m2 (l’équivalent de quinze terrains de football !), dont 10 000 m2 de bureaux, répartis sur quatre étages, complétés par une zone d’accès et de stationnement en sous-sol.
Philippe Arfi, directeur pour la France de Goodman, affirmant que l’entreprise, forte de ses 650 000 m2 d’actifs sous gestion dans l’Hexagone, et s’appuyant sur ses vingt-six bureaux dans le monde, se veut à la pointe du développement durable, livrait en mars 2022 un gondolant gloubi-boulga de greenwashing à la revue Grand Paris Développement (1) :
« Nous assumons de faire des choix volontaires en matière de localisation et de conception. En ce qui concerne la localisation, nous privilégions la transformation de friches ou la requalification d’immeubles pour éviter l’artificialisation. Sur la conception, nous réduisons substantiellement l’impact environnemental de nos développements en privilégiant la production d’énergie renouvelable in situ, l’emploi de matériaux biosourcés, recyclés et de béton bas carbone. La biodiversité n’est pas en reste et fait l’objet d’une démarche scientifique similaire avec pour objectif — au terme du processus de redéveloppement de nos sites —, de présenter un intérêt écologique supérieur à l’état initial. En dernier lieu, Goodman mène une politique de contribution visant à compenser 100 % des émissions résiduelles par l’achat de crédits carbone certifiés ICROA1 et par la participation à des actions locales pour la préservation de la biodiversité. »
Anciennement Haropa Port de Paris, Haropa Ports est un état dans l’État, qui associe désormais les villes du Havre (Edouard Philippe, Horizons), de Rouen (Nicolas Mayer-Rossignol, Parti socialiste [PS]) et de Paris (Anne Hidalgo, PS), avec pour objectif affiché de développer le transport fluvial sur l’axe Seine. Un mensonge extravagant.
« La France n’arrive pas à capter une part importante du trafic maritime international sur ses ports. Le tonnage de l’ensemble des ports français équivaut aujourd’hui au seul port de Rotterdam aux Pays-Bas. Anvers en Belgique est parfois même qualifiée de premier port français, une particularité surprenante vu la taille de la façade maritime de l’Hexagone, son positionnement stratégique et le nombre de ports prêts à accueillir des marchandises comme Marseille, Le Havre ou Saint-Nazaire. À cette situation s’ajoute une mauvaise liaison entre les ports français et les voies ferrées. Alors qu’à Hambourg près d’un tiers des marchandises transitent par le rail, seules 10 % des marchandises font de même dans les ports français », écrivait ainsi Ugo Thomas sur le site Internet Le Vent se lève, en décembre 2021 (2).
Qu’importe, Haropa Ports et son partenaire Goodman n’en démordent pas : il faut « fluidifier et rationaliser la logistique du “dernier kilomètre” à l’échelle de la région parisienne ». Or le nouveau trafic créé par le projet ne remplacera pas le trafic déjà existant, mais viendra s’ajouter à lui. Tout cela pour alimenter un cycle de surproduction et de surconsommation, via la création d’un nouvel opérateur, qui pourvoira aux besoins des populations aisées de l’agglomération parisienne, adeptes des achats en ligne et de la livraison à domicile, qui connaissent un véritable boom, accentué par la crise du Covid-19. Le soutien logistique de la « ville du quart d’heure », concept fumeux, et mantra de la maire de Paris Anne Hidalgo…
Concertation de façade
La mobilisation croissante des opposants ces derniers mois a débouché sur une situation ambiguë, puisque Goodman a mis sur pied, en s’appuyant sur le savoir-faire d’une entreprise spécialisée dans la « concertation », l’agence parisienne Trait Clair, un pseudo-dialogue qui se déroule hors de tout cadre légal. Quatre réunions se sont ainsi enchaînées en moins de deux mois dans ses locaux au port de Genevilliers, avec un bilan contrasté, comme le raconte une participante : « Ils ne répondent jamais vraiment à nos questions, on a l’impression que ce qui les intéresse c’est de dresser un catalogue de nos objections. Pour mieux se préparer à y répondre ensuite ? ».
Mais le collectif y a gagné l’accès à des informations précieuses, comme le souligne Antoine Gaudin : « Cet entrepôt du dernier kilomètre, soumis à un coefficient de rotation des marchandises extrêmement élevé, nuit et jour et 7 jours sur 7, est totalement hors-normes : 35 mètres de haut, la hauteur d’un immeuble de 12 étages, sur 600 mètres de long. Son impact visuel sur les berges de Seine c’est l’équivalent de deux stades de France posés côte à côte. Il sera aussi haut que le pont de l’A15 qui passe au-dessus de la Seine un peu plus à l’Ouest. »
Car l’entrepôt géant doit être implanté sur les rives de Seine, dans un secteur normalement protégé par le Schéma d’orientation et de développement durable (SODD) du Port, qui stipule que les activités les plus nuisibles doivent être reléguées à l’intérieur de son emprise, et épargner les bords de Seine. Le plan local d’urbanisme (PLU) de Gennevilliers indique aussi qu’une attention particulière doit être portée à l’insertion harmonieuse des structures dans le paysage, ce qui n’est absolument pas le cas ici, puisque le nouvel entrepôt, s’il est construit, triplerait la hauteur des constructions existantes sur le site, imposant dans le paysage naturel des berges de Seine côté Nord, zones de promenade, de loisirs et d’habitation, une sorte de Grande Muraille de Chine occasionnant de nombreuses pollutions visuelles, sonores et environnementales.
Un désastre environnemental
Enfin, et l’on comprend l’ire des associations écolo, vent debout contre le projet, le futur entrepôt longe sur 600 mètres, et dans une très grande proximité, la zone naturelle d’intérêt écologique de la pointe aval de L’Île-St-Denis (ZNIEFF), classée Natura 2000, réserve ornithologique de premier ordre, avec des espèces protégées par la directive Oiseaux de l’Union européenne (dont le martin pêcheur d’Europe) et une population hivernale de grands cormorans !
« Comment imaginer la cohabitation entre ces espèces d’oiseaux protégées, dont le site de l’Inventaire national du patrimoine naturel (INPN) stipule qu’il ne faut pas les perturber et respecter leur tranquillité, et une barre d’immeuble industrielle de 12 étages fonctionnant 24 heures sur 24, y compris la nuit avec un éclairage nocif pour eux, à une distance d’à peine 50 mètres, et donc des risques pour leurs trajectoires de vol ? D’autant plus que la rampe à poids lourds, qui emmènera les camions jour et nuit à 25 mètres de haut et les fera ensuite redescendre, se situe en plein devant leur habitat », poursuit Antoine Gaudin. Cet aspect n’a pas été pris en compte par les promoteurs de “Green Dock”. Ces derniers s’enorgueillissent du fait que leur futur entrepôt n’augmentera que légèrement la luminosité actuelle dans cette zone, en oubliant que, comme nous le dénonçons depuis des mois, la parcelle voisine de la leur produit un éclairage nocturne intense et anormal. Ils se basent donc sur une situation existante problématique pour minimiser l’impact de leur projet. C’est d’autant plus grave que ledit entrepôt comporte d’amples surfaces vitrées, des serres et des panneaux photovoltaïques, dont on connaît la dangerosité pour les oiseaux.
Le projet pose également de nombreuses questions quant à son impact sur la biodiversité : des espèces rares de moineaux, de lézards et de chauves-souris peuplent le site et son voisinage immédiat. L’implantation choisie est au confluent des trames verte, bleue et noire dans cette zone géographique, des trames qu’il menace d’interrompre. Les études environnementales fournies par les promoteurs ne permettent pas de se faire la moindre idée de cet impact, puisque seule la parcelle de l’entrepôt a été prise en compte, pas la zone Natura 2000 juste en face. Seuls certains enjeux ont été listés, mais aucune véritable étude d’incidence n’a été fournie. La société Biotope, qui se rengorge de ses références internationales, engagée par les promoteurs pour mener cette étude, ne va même pas effectuer ses observations en hiver, période d’hivernage des grands cormorans, car cela est incompatible avec la volonté des promoteurs de déposer le permis de construire fin 2022…
Michel Riottot, ancien président de FNE Ile-de-France, association au sein de laquelle il milite toujours, témoigne de l’évolution de son organisation : « Nous étions très embarrassés à FNE-Ile de France sur la position à prendre, car nous luttons contre l’artificialisation des terres agricoles, et en particulier contre celle des plateformes logistiques. Comme nous sommes aussi pour le transport fluvial, le projet Green Dock ne nous paraissait pas dangereux, et puis nous avons appris beaucoup de choses, et nous avons changé... »
Un mensonge déconcertant
Suite aux pressions exercées par le collectif sur le port de Gennevilliers et les mairies alentour, dont certaines, notamment Epinay-sur-Seine et L’Île-Saint-Denis, sont très fermement opposées au projet, contradictoire avec d’autres qu’elles portent depuis plusieurs années comme celui d’une base nautique, celui-ci a obtenu la mise en place d’un processus de concertation. Mais les promoteurs ne le prennent pas au sérieux, et se contentent de dérouler une communication d’entreprise biaisée et anesthésiante, font de la rétention d’information, fournissent des données qui ne sont pas crédibles, etc., au lieu de répondre avec précision à leurs questions.
« Par exemple, poursuit Antoine Gaudin, ils nous fournissent des données douteuses sur le nombre de camions qui circulera en amont, en aval et sur le territoire du port, et en fouillant un peu, car ils ne nous donnent jamais accès aux données brutes de leurs études, malgré nos multiples demandes, nous comprenons qu’ils partent du principe que les camions circuleront pleins, alors que l’on sait très bien que les coefficients de rotation et les exigences de rendement des entrepôts du dernier kilomètre contraignent souvent les camions à circuler avec une charge réduite. Il faut donc vraisemblablement prévoir deux à trois plus de camions que ce qu’ils annoncent, avec toute la pollution qu’ils génèrent. Les promoteurs ont même osé, lors de l’atelier “Insertion paysagère”, nous proposer des vues d’architecte dans lesquelles le bâtiment futur (haut de 35 mètres) tenait la même place dans le paysage que les bâtiments existants, qui ne dépassent pas 12 mètres... Et tout est à l’avenant. »
Reste que leur participation à cette pseudo « concertation » a permis aux opposants de lever un lièvre accablant. Le futur entrepôt est opportunément appelé « Green Dock » pour surfer sur la vague du greenwashing. Il comporte même une ferme urbaine sur son toit, des produits « bio » (bien sur !), seraient donc apparemment cultivés dans un environnement sur-pollué au milieu des poids lourds…
L’essentiel de la communication de l’entreprise lauréate de l’appel à projet s’axe sur la thématique du « report fluvial vertueux ».
Haropa Ports affirme ainsi vouloir « offrir des solutions logistiques de bout en bout, depuis les terminaux maritimes du Havre et de Rouen jusqu’au dernier kilomètre. Pour encourager ce mode d’acheminement des marchandises, un ponton de transbordement fluvial de 80 mètres va être construit, pour relier la route et le fleuve. Il offrira aux utilisateurs un accès direct et fonctionnel au transport fluvial, en amont et en aval. »
Or, l’entrepôt ne sera fluvial qu’à la marge : seuls 15 % des flux de marchandises entrants, et 15 % sortants, passeront par le fleuve, de l’aveu même des promoteurs du projet !
« Le reste, soit 85 % du trafic de marchandises, poursuit Antoine Gaudin, ce seront des camions poids lourds, qui arriveront en amont à l’entrepôt, et repartiront en aval livrer dans Paris, avec tout l’impact qu’ils génèrent en termes d’émission de gaz à effet de serre et d’encombrement sur des axes routiers (A15, A86, rues de Colombes, Gennevilliers, Epinay, etc.) déjà saturés. Les automobilistes qui emprunteront ces axes aux heures de pointe peuvent s’attendre à perdre plusieurs dizaines de minutes supplémentaires par jour dans les embouteillages générés par les flux routiers de “Green Dock”. »
Des élus bafoués
Et c’est à nouveau la Seine Saint-Denis, territoire d’entrepôts, comme l’a établi une étude de France Nature Environnement, qui en recensait 120 de plus de 5000 m2 entre Gennevilliers et Tremblay-en-France, qui va être frappée. Car « Green Dock » c’est 90 000 m2 d’entrepôt et 35 000 m2 de parkings et bureaux qui feraient office de territoire servant pour Paris. Car si l’entrepôt est bien prévu dans le 92, la plupart de ses externalités négatives sont pour le 93, de l’autre côté du fleuve.
L’affaire a été conduite dans une telle opacité que le 11 mars dernier les présidents et maires de Plaine Commune, du département de la Seine-Saint-Denis, et des villes d’Epinay-sur-Seine et de l’Ile Saint-Denis adressaient un courrier virulent au président d’Haropa Ports, lui indiquant n’avoir eu connaissance du projet que par les récriminations d’habitants qui y sont opposés !
« Quelle compatibilité avec l’ensemble des documents d’orientation concernant le secteur : futur SDRIF de l’Ile-de-France en cours de révision, Contrat de plan Etat-Région 2021-2027 (CPER), qui vient tout juste d’être adopté, PLU de Genevilliers, SCOT de la Métropole, plan climat-air-énergie territorial (PCAET), SDAGE et SAGE des rivières d’Ile-de-France ? », pointait enfin Léo Landau, un habitant de Genevilliers et vieux routier des batailles pour l’eau en Ile-de-France.
Un méthaniseur à marche forcée
Mardi 21 juin 2022. Le SYCTOM et le SIGEIF posent la première pierre d’un méthaniseur dans le port de Genevilliers… dans le prolongement du Green Dock !
Le SYCTOM et le SIGEIF sont deux gigantesques syndicats techniques franciliens, spécialisés dans le traitement des déchets, la distribution de gaz et les nouvelles énergies, au fonctionnement totalement opaque, à l’instar de leurs six autres homologues qui concourent à une véritable exception francilienne en matière de services publics essentiels (3).
Le président du SYCTOM, Eric Cesari, élu dans des conditions suspectes, vient d’ailleurs tout juste de perdre son siège, comme en a décidé le Conseil d’État le 12 juillet 2022.
L’affaire fait l’objet d’une campagne de propagande bien réglée, qui occulte tous les travers et les risques du projet.
Mardi 28 juin 2022, 15h50. Le salon des maires d’Ile-de-France, (AMIF), tient son congrès annuel à la Porte de Versailles.
Yann Wehrling, ex-écolo devenu vice-président à l’environnement de la Région Ile-de-France présidée par Valérie Pécresse, assure six représentants du secteur gazier du soutien de la région aux projets de méthaniseurs qui pullulent en Ile-de-France, comme ailleurs (4).
Car c’est bien à une fuite en avant éperdue à laquelle on assiste depuis quelques années dans l’Hexagone : 1565 méthaniseurs déjà en service, 124 en construction et 625 en projet (5) ! Une dérive gavée d’argent public, au plus grand profit de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et des énergéticiens, puisque les porteurs de projet bénéficient d’une rente colossale, avec des contrats de revente garantis durant 15 ans à GRDF, GRT Gaz ou ENGIE, à des tarifs dix fois supérieurs à ceux du gaz russe (6).
Mercredi 6 juillet 2022. La mairie de Genevilliers organise une réunion publique à 18h30, dédiée au projet de méthaniseur, avant un webinaire prévu cinq jours plus tard…
Pour Salim Mastouri et Aude Castro, membres du collectif, il s’agit d’un projet dangereux et précipité, pour anticiper un durcissement des normes, prévu en 2025. Or les usines de méthanisation ne sont pas vertueuses pour l’environnement.
« Au cas d’espèce on peut souligner la proximité d’une zone naturelle protégée Natura 2000, l’accroissement élevé du trafic routier pour amener les déchets, l’augmentation des gaz à effet de serre, notamment par les fuites de méthane. Des nuisances olfactives dans une zone dense d’habitation, des risques de pollution de la Seine en cas de crue, ou d’accident industriel. Des risques de maladie par les fuites de bactéries issues du stockage des déchets ou du procédé de méthanisation… »
Alors que le directeur du port, Jean Plateau, avait assuré plusieurs fois ces derniers mois au collectif qu’il « reviendrait vers eux » pour une concertation avant le dépôt du permis de construire et l’enquête publique, celle-ci débute en plein mois de juillet…
Les promoteurs du projet ont fait valoir que la nouvelle réglementation sur le traitement des déchets imposera à partir de 2025 le tri des déchets alimentaires dans les communes de la région Île-de-France. Ils évoquent aussi l’indépendance énergétique de la France (!), alors que les retombées seront très modestes, avec une valorisation faible, eu égard à sa taille, soit l’alimentation de cinq mille foyers en gaz via le méthane, et seulement quelques hectares qui pourraient recevoir le digestat issu du traitement, pour épandage…
La production d’énergie atteindrait 30 000 MWh pour 8 000 MWh consommés par l’usine, à comparer aux 735 GWh de production de gaz sur les quarante sites d’Île de France.
Il est prévu que le SYCTOM investisse pour passer à 100 000 tonnes en 2030, pour 50 000 tonnes au départ sur le site, qui n’est pas extensible. Ce qui signifie qu’il devra trouver un autre site pour l’extension.
Le bassin de population concerné compte 400 000 habitants, qui produisent entre 10 et 50 kg de déchets alimentaires par an.
Il y aurait « à la cible » quarante camions par jour selon l’intervenant. Des camions roulant au gaz et au méthane, plus quelques véhicules électriques, à comparer aux onze mille véhicules déjà opérationnels sur tout le territoire du SYCTOM. La collecte s’effectuerait 7 jours sur 7, de 6 h à 23 h.
Le site sera édifié sur une parcelle de 18 000 m2. Sa hauteur maximale sera de 22 mètres. Les arbres seront préservés côté Seine. La pointe restera une zone naturelle. Le quai sera coté darse, et non côté Seine, avec une péniche en permanence à quai et une autre en rotation.
Un plan de continuité d’activité est prévu pour traiter les zones inondables avec le vidage des cuves (y compris les 10 m3 d’acide).
Les promoteurs du projet évoquent ainsi la création d’un « casier-pilote » par les « Grands Lacs de Seine », un établissement public aujourd’hui géré par la Métropole du Grand Paris, sur le site de la Bassée, en Seine-et-Marne, qui permettrait de limiter les risques d’inondation de la Seine. Une fake news de la plus belle eau puisque le projet de la Bassée, encalminé depuis quarante ans, alors que les Grands Lacs étaient gérés par la ville de Paris, relève du pur affichage, sans aucun impact réel sur l’étiage du fleuve…
Sur les intrants, les promoteurs assurent qu’il n’y aura pas d’alimentation par des cultures, mais uniquement des collectes de déchets. Au départ, il y aurait une collecte de déchets tiers, avant de ne traiter que les déchets SYCTOM en rythme de croisière.
Sachant que les fuites de méthane contribuent beaucoup plus que les émissions des voitures à l’effet de serre, reste à évaluer les risques de fuite accidentelle avec pollution de la terre, de l’air et de la Seine, via une étude d’impact sur l’environnement et la population, ce qui n’a pas été fait jusqu’ici…
« À partir de 2018, les maires des territoires concernés ont été informés du projet. Il va passer au conseil d’administration de l’Agence pour le développement et la maîtrise de l’énergie (ADEME) pour un soutien d’une dizaine de millions d’euros sur la cinquantaine prévue, poursuit Michel Riottot de FNE Ile-de-France. À dater du premier janvier 2024, les ordures ménagères devront être triées et les produits organiques issus des ménages ne devront plus être incinérés… La méthanisation est une solution, le problème sera de trouver que faire des digestats en fin d’opération. Les agriculteurs ne sont pas chauds pour les épandre sur leurs champs. La Direction régionale de l’agriculture et de la forêt (DRIAAF) est très inquiète et ne donne son avis qu’avec réserve. »
En réalité, avec 52 millions d’investissement plus une vingtaine de millions de subventions — pour 8 millions de chiffre d’affaires —, les bénéfices n’excéderaient pas quelques centaines de milliers d’euros. Le chiffre d’affaires prévu ne couvrant que 30 % du coût de l’usine, l’activité n’est pas rentable.
« Tout cela est une vaste connerie », confie un agriculteur d’Ile-de-France, présent à la réunion, qui exploite lui-même un « petit » méthaniseur sur son exploitation.
Comme le SYCTOM, le SIGEIF et leur opérateur PAPREC sont tout sauf des enfants de chœur, il y a un loup, et quand il y a un loup, on sait qui va se faire croquer…
« Ce quinquennat sera écologique ou ne sera pas », proclamait M. Emmanuel Macron, à Marseille, avant sa réélection (7)…